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Services de mobilité partagée : panorama des offres en France et impact sur la voiture individuelle

Services de mobilité partagée : panorama des offres en France et impact sur la voiture individuelle

Services de mobilité partagée : panorama des offres en France et impact sur la voiture individuelle

Et si, dans dix ans, posséder une voiture individuelle en ville paraissait aussi anachronique que fumer dans un TGV ? La question peut faire sourire… mais elle est loin d’être absurde.

Autopartage, free-floating, covoiturage, vélo en libre-service, trottinettes, navettes autonomes : la France est devenue un laboratoire géant des services de mobilité partagée. Dans le même temps, la voiture personnelle reste ultra-dominante. On empile donc les offres, les applis, les opérateurs… mais est-ce que tout cela mord vraiment sur l’usage – et la possession – de la voiture individuelle ?

Plongeons dans le paysage français de la mobilité partagée et regardons, sans filtre, ce que cela change vraiment pour notre bon vieux réflexe « je prends ma bagnole ».

La voiture individuelle, ce totem qui vacille (un peu)

Commençons par le décor : la France est encore un pays de l’auto-roi.

Mais derrière ces chiffres, des fissures apparaissent :

C’est dans ce contexte que les services de mobilité partagée se sont imposés, pas comme un gadget « smart city », mais comme une vraie béquille face à la fatigue automobile. Sauf qu’entre l’enthousiasme des pitchs PowerPoint et la réalité des trottoirs, il y a parfois un monde.

Autopartage : la première brique pour se passer de deuxième voiture

L’autopartage, c’est l’idée simple (mais révolutionnaire) de mutualiser la voiture comme on mutualise déjà le train ou le bus : on paye à l’usage, pas à la propriété.

En France, on distingue deux grands modèles :

L’impact sur la voiture individuelle ? Il est documenté, et il n’est pas anecdotique :

Autrement dit : l’autopartage ne fait pas disparaître la voiture, mais il détricote doucement l’idéologie du « il m’en faut une à moi, tout de suite, tout le temps ».

Là où ça coince : l’autopartage reste très urbain, parfois cher si mal utilisé, et encore mal connu hors des grandes métropoles. En zone périurbaine, il pourrait être un game changer, mais sans stationnement réservé et sans soutien clair des collectivités, il végète.

Covoiturage du quotidien : remplir les voitures vides

On connaît tous Blablacar pour les trajets longue distance. Mais l’enjeu principal, ce n’est pas le Paris – Lyon du week-end : ce sont les 20 km quotidiens de trajet domicile-travail en voiture… très souvent tout seul dans l’habitacle.

La France pousse donc massivement le covoiturage du quotidien :

Sur le papier : c’est le jackpot. Pas besoin de nouvelles infrastructures lourdes, les voitures sont déjà là, les routes aussi. Il suffit de mieux les remplir.

Dans la réalité : la montée est lente, mais réelle. Les chiffres progressent surtout là où :

Est-ce que ça fait reculer la possession de voiture ? Pas encore de manière massive. On est plutôt sur une phase où la voiture personnelle est « mieux utilisée » qu’abandonnée. Mais sur certains territoires, le covoiturage récurrent commence à rendre la deuxième voiture franchement superflue.

Vélo, scooters, trottinettes en libre-service : les tueurs de petits trajets voiture

Les services de mobilité partagée ne se limitent pas à la voiture. Et ce sont même souvent les « petits engins » qui font le plus de dégâts sur l’usage automobile.

En France, on trouve aujourd’hui :

Ce que montrent les retours de terrain, c’est que ces modes attaquent un bastion très précis : les trajets de 1 à 5 km, ceux où la voiture était souvent utilisée par flemme, par habitude ou faute d’alternative lisible.

Remplacer un trajet de 3 km en voiture par un vélo ou une trottinette, c’est :

Est-ce que cela pousse à vendre sa voiture ? Pas tout de suite. Mais cela prépare le terrain : quand votre quotidien se met à tenir sur un mix transport en commun + vélo, la question de l’utilité d’un véhicule personnel revient vite sur la table.

Free-floating et VTC : la voiture, mais sans les emmerdes (et avec d’autres)

À côté des services structurés d’autopartage en station, le free-floating et les VTC ont redéfini la relation à l’auto dans les métropoles.

Le free-floating, c’est la voiture disponible à la volée, via une appli, sans station dédiée. Pratique, mais très gourmand en espace public et complexe à réguler. Beaucoup de services se sont retirés de certains marchés, faute de modèle économique solide ou de cadre politique clair.

Les VTC et taxis, eux, proposent un luxe nouveau pour les urbains : ne plus avoir à conduire. Pour certains, c’est devenu une alternative à la possession d’une voiture, combinée à l’usage ponctuel d’autopartage ou de location.

Impact sur la voiture individuelle ? Ambivalent :

On n’est donc pas sur une solution miracle, mais sur un élément de l’écosystème qui rend l’abandon de la voiture personnelle un peu plus envisageable pour ceux qui ont les moyens de payer à chaque trajet.

Grandes villes, périurbain, rural : trois réalités, trois mobilités partagées

On ne parle pas de la même France quand on parle de mobilité partagée à Paris, à Lens ou dans un village de la Creuse. Et c’est là que le débat devient vraiment intéressant.

Dans les grandes métropoles :

Dans le périurbain :

En milieu rural :

Si on prétend que la mobilité partagée va « tuer la voiture » partout, on se raconte des histoires. En revanche, elle peut réduire la dépendance automobile, surtout pour les foyers qui cumulent aujourd’hui deux ou trois véhicules faute d’alternative.

Ce que la mobilité partagée change vraiment pour la voiture individuelle

Revenons à la question centrale : est-ce que ces services font reculer la voiture individuelle, ou est-ce qu’ils ne sont qu’un gadget de plus dans le paysage urbain ?

Les tendances lourdes qui se dessinent :

Mais soyons lucides : la voiture individuelle reste ultra-majoritaire, surtout quand on sort du cœur des métropoles. Pour l’instant, la mobilité partagée grignote, mais ne renverse pas la table.

Les freins : culture, politique, business model (et un peu de mauvaise foi)

Si la mobilité partagée n’a pas encore transformé massivement notre rapport à la voiture, ce n’est pas juste une question de technologie ou d’offre.

Freins culturels :

Freins politiques et réglementaires :

Freins économiques :

Ajoutons à cela une bonne dose de résistance au changement : tant que la voiture démarre le matin et passe le contrôle technique, pourquoi s’embêter avec une appli de plus sur son smartphone ?

Ce qu’il faudrait changer pour que la mobilité partagée devienne la norme

Si on veut sérieusement réduire la dépendance à la voiture individuelle, il va falloir arrêter de considérer la mobilité partagée comme un bonus sympa et commencer à la traiter comme une brique centrale du système de transport.

Côté pouvoirs publics :

Côté entreprises :

Côté opérateurs de mobilité :

Côté usagers (nous tous) :

Vers une nouvelle hiérarchie des mobilités

La mobilité partagée ne va pas, par magie, « remplacer la voiture » en France. En revanche, elle est déjà en train de redessiner la hiérarchie des modes :

La voiture individuelle restera dans le paysage français encore longtemps, surtout hors des métropoles. Mais elle peut cesser d’être l’alpha et l’oméga de nos déplacements. À condition de sortir d’une vision gadget de la mobilité partagée et d’en faire un véritable pilier de politique publique, de stratégie d’entreprise… et de choix personnels.

La vraie question, au fond, n’est pas : « Peut-on se passer de voiture ? » Elle est plutôt : « Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour n’utiliser une voiture que quand elle est vraiment nécessaire ? »

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